Annabelle (Rocking Chair)

Tu as préparé mon trône de bois. Mon lieu d’invocation. Tu m’as réinventée, trois ans après. Glissée dans une nouvelle robe, tressé mes cheveux abîmés, comme si tu jouais à la poupée.
Tu as refait mes yeux… pourtant, ils ont déjà tout vu : les prêtres, les barreaux de verre, les doigts tremblants des Warren.
J’étais censée rester enfermée dans ma vitrine. Mais tu m’as ressortie. Tu m’as recousue.
N’as-tu donc pas peur de moi ? Que j’écrive encore des mots au crayon rouge, que je me déplace à ma guise chez toi ?
Tu crois dompter ma nature avec du fil, comme d’autres m’ont emprisonnée de foi, de peur, de miracle et de mensonge.
Tu as commis l’erreur de me donner un nouveau corps. Tu m’as appelée “art”… c’est plus joli. Mais l’histoire finit toujours pareil : je me réveille quand on m’observe comme la jolie petite poupée que je ne suis pas.
Vas-y, montre-leur mes coutures, mes yeux en boutons, ma bouche cousue. Donne-leur envie de me poser sur leurs étagères. Je m’y bercerai jusqu’à ce qu’ils entendent le grincement de mon éveil. Tu veux montrer ma beauté. Je vais leur montrer la peur.
Continue à filmer, Mika… que tout le monde voie ce que tu as réveillé. Tu m’offres enfin la possibilité de tous les posséder.